Il y a près de 5000 ans, l’exploitation de l’argent sur les rives de la mer Egée Une découverte archéologique exceptionnelle à Thorikos (Grèce)

Communiqué de presse

Publié le 23 mars 2016 Mis à jour le 23 mars 2016

Au pied de l’acropole mycénienne de Thorikos, dominant la rade de Lavrio, en Grèce, une équipe française d’archéologues miniers sous la direction du Prof. Dr Denis Morin de l’Université de Lorraine, rattaché à l’UMR CNRS 5608 de Toulouse, vient de découvrir un inextricable réseau de galeries, de puits et de chambres d’exploitations.


Communiqué de presse

Il y a près de 5000 ans, l’exploitation de l’argent sur les rives de la mer Egée
Une découverte archéologique exceptionnelle à Thorikos (Grèce)

Au pied de l’acropole mycénienne de Thorikos, dominant la rade de Lavrio, en Grèce, une équipe française d’archéologues miniers sous la direction du Prof. Dr Denis Morin de l’Université de Lorraine, rattaché à l’UMR CNRS 5608 de Toulouse, vient de découvrir un inextricable réseau de galeries, de puits et de chambres d’exploitations. Près de 5 kilomètres de conduits souterrains taillés dans les marbres et les schistes de l’Attique ont été parcourus et cartographiés. Ils débouchent sur des labyrinthes de chantiers complexes dont la hauteur n’excède pas parfois 30 cm: actuellement le plus vaste réseau souterrain exploré dans cette partie du monde égéen. Les scientifiques ont également déployé un drone pour repérer les installations de surfaces liées à l’exploitation minière. C’est la première fois qu’un tel complexe souterrain est étudié.
 

 
Thorikos. Chambre d’exploitation en plateures : les minéralisations sont localisées ici dans une interstrate.
Au sol, amoncellement de stériles abandonnés par les mineurs. Denis Morin, Author provided

Ces travaux d’investigations souterraines s’intègrent dans le cadre d’un vaste programme de recherches archéologiques sur le site de Thorikos sous la direction du Prof. Roald Docter de l’Université de Gand et sous la tutelle de l’Ecole Belge d’Athènes, de l’Université d’Utrecht et de l’Éphorie de l’Attique Orientale.
Denis Morin, s’exprime sur cette découverte: «On a peine à imaginer aujourd’hui les conditions extrêmes dans lesquelles ces mineurs travaillaient dans ces dédales de galeries. Il règne dans cet environnement minéral une chaleur étouffante. La progression nécessite un effort et une vigilance de tous les instants dans cet espace confiné où le taux d’oxygène doit être en permanence surveillé… Les traces d’outils sur les parois, les graffitis, les lampes à huile, les aires de concassage attestent de l’activité omniprésente de ces mineurs de fond. La dureté de l’encaissant et des minéralisations témoigne des capacités extrêmes de résistance de ces ouvriers, pour la plupart esclaves, condamnés à l’obscurité et à l’abatage du minerai de plomb argentifère… Cartographier ces réseaux à la fois exigus, complexes et anastomosés et dont les ramifications se situent parfois à plusieurs niveaux représente un réel défi sur le plan scientifique».

Sous terre, la morphologie et l’organisation des travaux permettent de distinguer plusieurs phases d’occupation. Les données relevées et observées durant la toute dernière phase de la campagne de 2015 : céramique, maillets à gorges façonnés en roche volcano-sédimentaire, pointent vers une datation très haute de la phase la plus ancienne (Néolithique Final / Helladique ancien : autour de 3200 av. J.-C.) des mines. Si les recherches futures permettent de confirmer cette hypothèse, l’horizon chronologique des exploitations minières dans la région de l’Attique et le monde égéen s’en trouvera profondément modifié. La phase classique est de loin la plus perceptible; omniprésente, elle est remarquable par la régularité des tronçons de galeries compartimentées qui quadrillent l’espace. Des fragments de récipients et de lampes et même une inscription grecque soigneusement gravée sur une paroi, témoignent de cette période. Conduits taillées à la pointerolle, de profils quadrangulaires, découpage de la roche en panneaux successifs, telles sont les caractéristiques de ces chantiers particulièrement soignés.

Cette reprise généralisée des travaux se confirme à la fin de la période classique (IVe siècle av. J.-C.) comme en témoignent les traces de foudroyage des galeries antiques et les vestiges de céramiques. Les puits découverts à l’intérieur de ce réseau mettent en relation les deux principaux niveaux de minéralisations. D’une architecture géométrique parfaite, calibrés au millimètre, ils restent une énigme tant le soin apporté à leur réalisation est impressionnant. Aujourd’hui, ils ne sont accessibles qu’au moyen des techniques de spéléologie alpine. Dans ces galeries abandonnées, certaines sont restées inviolées depuis près de 5 000 ans. D’autres, inaccessibles ont été intégralement remblayées lors des phases successives d’exploitation. La progression d’archéologues aguerris, porteurs d’équipements de haute technologie reste difficile: elle s’effectue dans une atmosphère étouffante avec une température supérieure à 21° C.


 
Thorikos. Puits antique de section quadrangulaire en cours d’exploration.
Orifice de jonction entre les deux principaux niveaux de minéralisation. Denis Morin, Author provided


La mine découverte à Thorikos est exceptionnelle dans son développement. Jusqu’ici les archéologues miniers qui travaillent sur le Laurion n’avaient pu explorer une telle amplitude de galeries et de chantiers ; ils témoignent des aptitudes physiques et de l’habileté de ces mineurs pour exploiter ces gisements complexes et assurer le traitement les minerais en surface dès la Préhistoire. Leur généralisation relève d’une stratégie délibérée à l’origine d’une parfaite maitrise technologique et spatiale: une concentration exceptionnelle des moyens pour extraire l’argent et un système technique unique dans le monde antique à ce niveau d’échelle.

Exploitées dès le IVe / IIIe millénaire avant JC, ces mines d’argent ont constitué le plus important centre minier de la Grèce aux Ve et IVe siècles av. JC et le fondement de la domination d’Athènes sur le monde égéen. La campagne d’exploration 2015 apporte des informations inédites sur les techniques minières développées depuis les premiers Âges des métaux dans cette zone stratégique de Méditerranée orientale. Les recherches qui se poursuivent, n’ont pas seulement pour objectif de cartographier ces vestiges, mais elles permettent d’appréhender des techniques minières inédites pour ces périodes très anciennes comme la gestion des ressources minérales, l’abattage, le fonçage et la circulation des matériaux … des travaux entièrement conçus de la main de l’homme et qui anticipent déjà les mutations technologiques du Moyen-Age.

Contact Informations :

École Belge d’Athènes
Makri 11
11742 Athènes
+30.210.36.47.102
+30.210.36.47.103
info@ebsa.info

Prof. Dr. Denis Morin
Université de Lorraine
(UMR CNRS 5608)
Tel. +33686132432
denis.morin@univ-lorraine.fr

Prof. Dr. Roald Docter
Université de Gand
Departement d’Archéologie
Sint-Pietersnieuwstraat 35
B-9000 Gand – Belgique
Tel. +32.484734641
Roald.Docter@UGent.be


Téléchargez le communiqué de presse

Revue de presse :

http://theconversation.com/il-y-a-pres-de-5-000-ans-lexploitation-de-largent-sur-les-rives-de-la-mer-egee-54910
http://www.nationalgeographic.com.es/articulo/historia/actualidad/11143/investigan_una_las_minas_mas_antiguas_grecia.html
http://www.eurekalert.org/pub_releases/2016-02/gu-s5y021016.php
Le site Anaskafi - Les amoureux de l'archéologie
Site "Ville de Lavrio" - Le blog du Laurion
http://thesecretrealtruth.blogspot.com/2016/02/5000.html
http://www.archaeology.wiki/blog/2016/02/05/5000-years-ago-silver-mining-shores-aegean-sea/
http://www.palo.gr/multimedia/politistika-nea/prosklisi-stin-etisia-xoroesperida-toy-syllogoy-pontiwn-layrioy-mithridatis/14065453/
www.istorikoiperipatoi.gr/author/istorikos/
http://www.naftemporiki.gr/story/1063953/eksoruksi-argurou-prin-apo-5000-xronia-ston-thoriko-laureotikis