-
Partager cette page
Du Néolithique aux sociétés complexes au Proche-Orient, dans la vallée du Nil et dans la Corne de l'Afrique
Ce thème couvre un large champ chronologique, du 9e au 3e millénaire avant notre ère. Il est animé par plusieurs grands projets en cours portés par les membres de l’équipe sur des territoires aussi variés que le Proche-Orient, l’Egypte et la Corne de l’Afrique. La question de l’émergence du Néolithique est au cœur de la réflexion. Cette problématique étudie les conditions d’implantation, d’adaptation et de développement des premières sociétés de production en prenant en compte les facteurs du milieu, du climat et de la biodiversité. L’aboutissement du processus est observé dans la vallée du Nil par l’étude de la période charnière du IVe millénaire, en rapport avec la transition vers l’État.
La néolithisation de Chypre
Les recherches conduites ces 20 dernières années ont permis de combler l’absence initiale de données des 8e et 9e millénaires avec la découverte des sites de Shillourokambos puis de Klimonas. Le 10e millénaire est une période charnière de l’histoire du climat et de la biodiversité (transition entre le Tardiglaciaire et l’Holocène), et de celle des sociétés du Proche-Orient (naissance des villages et émergence de l’agriculture). Savoir et comprendre comment ces phénomènes majeurs se sont déclinés sur Chypre apparaissent donc comme deux enjeux majeurs de la recherche en Méditerranée orientale. C’est pourquoi nous avons orienté nos recherches vers ce 10e millénaire chypriote jusqu’à présent inconnu. Ce projet est soutenu par le MAEDI (programme Néolithisation), l’Ecole française d’Athènes, le SEEG Limassol de l’InEE et le Muséum national d’histoire naturelle (mission labellisée Grandes expéditions).
Klimonas, village PPNA, (Chypre) © Clichés : mission Neolithisation
Paléoenvironnements, paléoclimats et émergence de l’empreinte culturelle humaine dans les écosystèmes
Les recherches environnementales conduites au Proche-Orient (Chypre, Syrie, Liban, Israël ; depuis le Néolithique à l’Age du Fer) sont fortement liées à l’Histoire des Hommes, des civilisations, aux interactions entre l’Homme et son environnement ainsi qu’à l’émergence d’une empreinte anthropique dans les paysages. Ces travaux sont axés sur la perception et les différentes adaptations des populations et civilisations anciennes face aux changements environnementaux ; à déchiffrer comment ces peuples ont modifié durablement leur milieu ; et à estimer comment leur évolution culturelle a pu être influencée par des variations climatiques / environnementales. La question centrale repose donc sur une rupture, sur comment l’Homme, qui s’est adapté depuis des millénaires aux fluctuations naturelles de son environnement, a choisi de le domestiquer, de le sélectionner et de le « plier » à ses besoins. Cette question repose sur l’évolution culturelle de l’homme ainsi que sur une réorganisation de son système de subsistance afin de contrôler les ressources et de baisser sa dépendance aux espèces sauvages qui varient en fonction des fluctuations environnementales / climatiques. Il s’agit de comprendre comment l’homme est passé d’une économie de prédation à une économie de production et d’en reconstruire les conséquences environnementales sur le long terme. En traversant les millénaires, les civilisations méditerranéennes ont su démontrer l’ampleur de la plasticité et de l’adaptabilité humaine face aux pressions environnementales.
De la sédentarisation à la naissance de l’État en Égypte et la néolithisation de la Corne de l’Afrique
Le programme prend appui sur plusieurs des travaux archéologiques de l’IFAO dirigés par les membres de l’équipe en Egypte.
Un premier axe porte sur l’étude des premières sociétés néolithiques dans le désert occidental (oasis de Kharga), dans le delta du Nil (Tell el-Samara), où sont recherchés les premiers indices de domestication animales et végétales et dans le désert oriental (ouadi Araba) qui constitue une zone de contact avec les sociétés néolithiques précéramiques du Sinaï et du sud levant.
Le deuxième axe concerne le IVe millénaire au cours duquel s’opèrent des changements majeurs dans la vallée du Nil en rapport avec la transition vers l’État. Il repose sur l’étude de l’agglomération prédynastique de Tell el-Iswid (Delta du Nil) où de nouvelles approches sont développées, notamment par l’étude des productions céramiques et des techniques architecturales. Le projet Galala, consacré à l’étude des mines de silex du désert oriental, participe à l’étude des systèmes de production lithiques entre les IVe et IIIe millénaires et aux réseaux de diffusion. Un autre volet, mené en collaboration avec la Macquarie University de Sydney, est consacré à l'étude des tombes d’élite de la Ire dynastie (Abou Rawach).
Par ailleurs, le programme interdisciplinaire PSPCA Premières Sociétés de Production dans la Corne de l’Afrique (dir. J. Cauliez), subventionné et accrédité par la commission des fouilles du Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères, l’Ambassade de France en République de Djibouti et l’IRAH à Djibouti, permet d’enrichir cette thématique de la mise en place des premières sociétés de production en ouvrant les réflexions sur une vaste aire géographique et plus précisément sur les liens que peuvent entretenir l’Éthiopie et la République de Djibouti avec le Soudan, le sud de l’Égypte et la Péninsule arabique. Les recherches conduites sur ce terrain de la Corne permettent d’explorer, en résonance, la diversité des processus d’émergence de l’économie de production, les différentes trajectoires des sociétés holocènes et la notion de stress écologique, dans une partie de la planète fortement contrastée sur le plan des paysages (hauts plateaux, plaines désertiques, littoraux…) et des changements climatiques et environnementaux durant ces 20 derniers millénaires (alternances de phases hyper aride et humide).
Antakari 3, sépulture collective des premiers éleveurs de la Corne de l’Afrique. Clichés : Jessie Cauliez