D’une rive à l’autre entre Garonne et Méditerranée : réflexion sur la variabilité des industries lithiques du Paléolithique ancien

Publié le 14 septembre 2024 Mis à jour le 14 septembre 2024
le 26 septembre 2024
15h
Université Toulouse Jean Jaurès, campus Mirail, Maison de la Recherche, salle D29
20221209_soutenance
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Soutenance de Justin Guibert

Justin Guibert soutiendra publiquement sa thèse de doctorat intitulée D’une rive à l’autre entre Garonne et Méditerranée : réflexion sur la variabilité des industries lithiques du Paléolithique ancien le jeudi 26 septembre 2024 à 15h, en salle D29 de la Maison de la Recherche, Université Toulouse Jean Jaurès.

Son doctorat a été dirigée par François Bon et Hubert Forestier.

Lien visioconférence

https://univ-tlse2.zoom.us/j/99690204553?pwd=VW8v86MCK4Bu20Pjbh4HcapUaJsozQ.1

Composition du jury

  • François Bon, Professeur, Université Toulouse Jean Jaurès, UMR 5608 TRACES Directeur de thèse
  • Hubert Forestier, Professeur, Muséum National d’Histoire Naturelle, UMR 7194 HNHP Co-directeur de thèse
  • Élisa Nicoud, Chargée de recherche HDR, CNRS, UMR 7264 CEPAM Rapporteure
  • Javier Baena Preysler, Professeur, Universidad Autónoma de Madrid, LAEX Rapporteur
  • Magali DELMAS Professeure, Université de Perpignan Via Domitia, UMR 7194 HNHP Examinatrice
  • Sonia Harmand, Chargée de recherche, CNRS, UMR 5608 TRACES Examinatrice
  • Jacques Jaubert, Professeur, Université de Bordeaux, UMR 5199 PACEA Examinateur
  • Isis Mesfin, Chargée de recherche, CNRS, UMR 7194 HNHP Examinatrice


Résumé

L’archéologie du Paléolithique ancien trouve sa singularité dans sa confrontation avec des contextes climatiques, environnementaux et géographiques étirés sur la très longue durée. Elle fait face à des échelles spatiales et temporelles très grandes alors même (ou parce) qu’elle ne dispose que de rares témoignages tamisés par les effets du temps. Dans son élan scientifique, cette archéologie se donne pour objectifs de documenter et de déchiffrer les comportements sociaux des populations humaines qui peuplaient alors « l’Ancien Monde ». Cet aspect culturel, qui nous intéresse ici, est difficile à saisir puisqu’il condense de multiples facettes (temps et structuration de l’occupation, temporalité, fonction et insertion des sites dans leurs territoires) auxquelles nous sommes bien souvent en peine de répondre. Cependant, un des moyens d’accès à ces données comportementales est celui des objets lithiques qui composent l’immense majorité des restes archéologiques de ces périodes reculées. Depuis qu’elles sont étudiées, les industries lithiques du Paléolithique ancien témoignent d’une forte variabilité typo-technologique dont les contours exacts nous échappent encore. Ce travail comme d’autres avant lui s’engage dans cette archéologie en prenant comme voie d’entrée, un espace géographique contraint, limité à l’ouest par la Garonne et à l’est par la Méditerranée. Au sein cet espace, l’étude porte sur un total de huit sites (Labadie, La Rominguière, Bichou, En Jacca - La Sauvegarde 1, La Llabanère, le Jas, le Moulin à soufre et la grotte d’Aldène) et de douze séries lithiques répartis en deux sous-espaces géographiques : le Bassin garonnais et la façade méditerranéenne. Ces assemblages proviennent de contextes géomorphologiques (terrasse alluviale/grotte) et archéologiques (fouille préventive, fouilles de sauvetage/programmées et prospections de surface) divers impactant nécessairement la qualité de l’information et par voie de conséquence la portée de nos interprétations. Néanmoins, les cadres chronostratigraphiques régionaux indiquent que ces sites auraient un âge compris entre les SIM 13 et 9 correspondant à une partie du Pléistocène moyen. Dans cette perspective, notre recherche s’est fondée sur une approche technologique et structurelle permettant de révéler les principaux objectifs de production ainsi que les intentions structurelles matérialisées par les « boîtes à outils ». Les résultats obtenus soulignent des récurrences dans la collecte et la gestion des matières premières symbolisée par la mobilisation de deux principales conceptions de débitage. Ces récurrences génèrent des produits plus ou moins normalisés (éclats à bords (sub)parallèles, à bords ovalaires ou éclats à dos) qui possèdent naturellement des potentiels fonctionnels. Seule une faible portion de ces produits-supports a été confectionnée illustrant la diversité du petit outillage qui est également représenté par des supports issus d’autres chaînes opératoires. Malgré la présence de structures volumétriques similaires, les assemblages entre Garonne et Méditerranée livrent des technotypes de macro-outils assez variés qui semblent s’articuler avec les panels de matières premières locales à disposition. En outre, l’analyse du macro-outillage fait ressortir l’importance de l’organisation des volumes naturels (convexités/méplats) à partir desquels se construit une grande part de ces outils sur galet. Ces données croisées dans un premier temps à l’échelle régionale puis dans un second temps à l’échelle continentale avec des séries lithiques pénécontemporaines (résolution au stade isotopique) provenant de contextes stratigraphiques fiables permettent de questionner l’essence de cette « déconcertante variabilité », d’avancer une dénomination renouvelée de ces outils anciens et par la même de renseigner certains traits comportementaux des populations humaines prénéandertaliennes au nord des Pyrénées.

Abstract

Lower Palaeolithic archaeology is unique in that it is faced with climatic, environmental and geographical contexts spread over a very long period of time. It has to deal with very large spatial and temporal scales, even though (or because) it only has rare evidence that has been sieved by the effects of time. In its scientific impulse, archaeology has set itself the goal of documenting and deciphering the social behaviours of human populations that populated the "Old World" at the time. This cultural aspect, which interests us here, is difficult to grasp because it combines multiple dimensions (time and structure of occupation, temporality, function and integration of sites in their territories) to which we are often at a loss for answers. However, one way of accessing this behavioural data is through the lithic objects that make up the vast majority of archaeological remains from these distant periods. For as long as they have been studied, lithic industries of the Lower Palaeolithic show a high degree of typo-technological variability, the exact contours of which still elude us. This study, like others before it, initiates with a restricted geographical area, bordered to the west by the Garonne and to the east by the Mediterranean. The study focused on a total of eight sites (Labadie, La Rominguière, Bichou, En Jacca - La Sauvegarde 1, La Llabanère, le Jas, le Moulin à soufre and Aldène Cave) and twelve lithic series divided into two geographical sub-areas: the Garonne basin and the Mediterranean coast. These assemblages come from a variety of geomorphological (alluvial terrace/karstic cave) and archaeological contexts (preventive excavations, rescue/programmed excavations and surface surveys), which necessarily impact the quality of the information and consequently the scope of our interpretations. Nevertheless, regional chronostratigraphic frameworks indicate that these sites are between MIS 13 and MIS 9, corresponding to a part of the Middle Pleistocene. In this context, our research was based on a technological and structural approach that revealed the main production objectives as well as the structural intentions expressed by the 'toolkit'. The results highlight recurring patterns in the collection and management of raw materials, symbolised by the mobilisation of two main concepts of debitage. These recurring patterns generate more or less standardised products (flakes with (sub)parallel edges, oval edges or backed flakes) which have a natural functional potential. Only a limited number of these blanks were retouched, illustrating the diversity of small tools, which are also represented by blanks from other “chaînes opératoires”. Despite the presence of similar volumetric structures, the assemblages between the Garonne and the Mediterranean yield varied technotypes of macro-tools that seem to be linked to the panels of local raw materials available. In addition, analysis of the macro-tools reveals the importance of the organisation of natural volumes (convexities/flats) from which a large proportion of these pebble tools are constructed. These data, compared firstly on a regional scale and then on a continental scale with penecontemporary lithic series (at an isotopic resolution) from reliable stratigraphic contexts, make it possible to question the essence of this 'disconcerting variability', to propose a new designation for these ancient tools and, by the same token, to provide information on certain behavioural characteristics of pre-Neanderthal human populations north of the Pyrenees.