La Néolithisation des Alpes françaises du Nord : contexte d’une phase de transition d’après l’étude des industries lithiques de l’abri-sous-roche de la Grande Rivoire

Publié le 7 décembre 2023 Mis à jour le 8 décembre 2023
le 21 décembre 2023
9h
Université Toulouse 2 Jean Jaurès, Maison de la Recherche, salle D29
20231221_soutenance_Dallaire
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Soutenance de Marc-André Dallaire

Marc-André Dallaire soutiendra sa thèse de doctorat le 21 décembre 2023, à 9h00, à l’Université de Toulouse 2 Jean Jaurès, 5 allée Antonio Machado, Maison de la Recherche de Toulouse (salle D29).
 

Résumé

La période de transition entre la fin du Second Mésolithique et le début du Néolithique ancien est considérée comme une phase singulière de la Préhistoire. Généralement située entre 5500 et 5350 cal. BC dans les Alpes françaises du Nord, la néolithisation se caractérise par un abandon progressif d’un mode de subsistance basé sur la chasse et la cueillette qui se voit remplacé par l’apparition d’une économie fondée sur la production des denrées. Bien que la pratique de l’agriculture et de l’élevage s’accroisse avec l’expansion du Néolithique, la chasse n’est toutefois pas abandonnée par les communautés préhistoriques, comme le démontre la présence d’armatures de flèches et de vestiges de faunes sauvages retrouvés dans les assemblages associés au Néolithique ancien.

En revanche, une rupture typo-technologique importante est observable entre les ensembles mésolithiques du Castelnovien à trapèzes asymétriques obtenus par bitroncature directe, et ceux du Néolithique ancien méridional dont les armatures tranchantes sont façonnées par troncatures inverses ou alternes et amincies par retouches rasantes. Dans les Alpes françaises du Nord, la séquence chronoculturelle est marquée par de nombreuses imprécisions conséquentes de la rareté de stratigraphies complètes pour la période, de mobiliers souvent peu nombreux souffrant d’études incomplètes, voire préliminaires. En outre, la diachronie est complexifiée par la présence d’ensembles « mixtes » où des éléments caractéristiques du Second Mésolithique et du Néolithique ancien sont identifiés conjointement dans un même niveau. Par conséquent, il est aujourd’hui encore difficile d’appréhender les modalités de l’apparition du Néolithique dans la région.

Une étude récente des industries de l’abri-sous-roche de la Grande Rivoire, localisé dans le nord du massif du Vercors (Isère), favorise la réévaluation de notre perception des processus de néolithisation dans la région nord-alpine. Le gisement possède l’une des rares séquences stratigraphiques fiable, révélant une occupation quasi sans interruption du début du Mésolithique jusqu’à la période gallo-romaine, ainsi qu’un mobilier riche de plusieurs milliers de pièces lithiques. L’étude complète des industries issues des opérations récentes – sous la direction de Pierre-Yves Nicod entre 2000 et 2017 – a permis de caractériser les chaînes opératoires employées par les tailleurs préhistoriques, favorisant une meilleure appréhension des sous-systèmes techniques lithiques de la phase récente du Second Mésolithique jusqu’au début du Néolithique ancien sur le gisement.

Ces mobiliers sont également mobilisés pour la réalisation d’analyses statistiques susceptibles de mettre en évidence des traits de rupture ou de continuité dans l’évolution typologique et technologique des industries lithiques des différentes phases d’occupation. En l’occurrence, cette étude cherche à déterminer si l’on est en présence d’un remplacement de populations par colonisation ou expansion démographie ou au contraire d’un lent processus d’acculturation des groupes chasseurs-cueilleurs autochtones, lesquels auraient ainsi été des acteurs pleinement actifs de ce changement culturel.
 

Abstract

The transition period between the end of the Second Mesolithic and the beginning of the Early Neolithic is considered a singular phase of Prehistory. Generally situated between 5500 and 5350 cal. BC in the northern French Alps, neolithization is characterised by a gradual abandonment of subsistence mode based on hunting and gathering, replaced by the emergence of an economy based on the production of food. Although the practice of agriculture and livestock increased with the expansion of the Neolithic, hunting is not abandoned by prehistoric communities, as evidenced by the presence of arrowheads and wildlife remains found in assemblages associated with the early Neolithic ensembles.

On the other hand, there is a major typo-technological break between the Mesolithic assemblages of the Castelnovian with asymmetrical trapezoids obtained by direct bitroncatures, and those of the southern Early Neolithic whose arrowheads are fashioned by inverse or altern truncations and thinned by flat retouches. In the northern French Alps, the chronocultural sequence is marked by a number of inaccuracies due to the scarcity of complete stratigraphies for the period and the frequently small number of archaeological finds suffering from incomplete or even preliminary studies. In addition, the diachrony is complicated by the presence of “mixed” assemblages where elements characteristic of the Second Mesolithic and the Early Neolithic are identified together in the same levels. As a result, it is still difficult to understand how the Neolithic appeared in the region.

A recent study of the industries from the Grande Rivoire rockshelter, located in the north of the Vercors massif (Isère), contribute to a reassessment of our perception of the neolithization process in the northern French Alps. The site has one of the few reliable stratigraphic sequences, revealing virtually uninterrupted occupation from the early Mesolithic to the Gallo-Roman period, as well as a rich assemblage of several thousand lithics pieces. The complete study of the industries from recent operations – under the direction of Pierre-Yves Nicod between 2000 and 2017 – has enabled us to characterise the chaîne opératoire used by the prehistoric, providing a better understanding of the lithic technical sub-systems from the recent phase of the Second Mesolithic to the beginning of the Early Neolithic at the site.

These artefacts are also mobilized for carry out statistical analyses that can highlight any breaks or continuities in the typological and technological evolution of the lithic industries between the different occupation phases. In this way, this study seeks to determine whether populations were replaced by colonization or demographic expansion or, on the contrary, whether there was a slow process of acculturation of the indigenous hunter-gatherer groups, which would have been fully active players in the cultural change.
 

Composition du jury

Didier BINDER, DR émérite CNRS, UMR7264 CEPAM, Nice
Federica FONTANA, Professeure, Université de Ferrara, Italie
Oreto GARCIA-PUCHOL, Professora Contractada Doctora, Universitat de València, Espagne
Thomas PERRIN, DR CNRS, UMR5608 TRACES, Toulouse
Éric THIRAULT, Professeur, Université Lyon 2, Lyon
Nicolas VALDEYRON, Professeur, Université Toulouse 2, UMR5608 TRACES, Toulouse
Alexandre ANGELIN, chercheur indépendant, docteur UT2J, chercheur associé UMR5133 Archéorient, Lyon
Elsa DEFRANOULD, post-doctorante, UMR7264 CEPAM, Nice