Le Centre d’Anthropologie, l’École des Hautes Études en Sciences Sociales et l’UMR TRACES : un bref historique

Publié le 2 février 2012 Mis à jour le 3 décembre 2018

En 1970 naissait à Toulouse, sur la proposition des professeurs Jacques Ruffié et Louis Lareng, l’Institut Pyrénéen d’Etudes Anthropologiques (IPEA). Cette association, basée au CHU de Purpan, avait pour ambition de réunir les universitaires toulousains ou extérieurs de toutes disciplines travaillant sur les Pyrénées. Pour donner des moyens à un tel programme fédérateur, il fut décidé de demander au CNRS la création d’une Recherche Coopérative sur Programme (RCP) qui assumerait les moyens financiers nécessaires aux missions de terrain et à la recherche documentaire. Ainsi naquit la RCP 323 (« Anthropologie et Ecologie Pyrénéennes ») qui regroupa archéologues, historiens, anthropologues, linguistes, démographes, géographes, généticiens, etc. autour de quelques zones-témoins de la chaîne et dont l’objectif était l’étude des populations pyrénéennes « du biologique au culturel » (1973-1978).
 
J. Guilaine assumait la double direction de l’IPEA et de la RCP. A l’extinction de cette dernière en 1978, le CNRS souhaita qu’une formation permanente en prenne le relais dans deux des disciplines qui s’étaient le plus illustrées dans l’opération : l’archéologie des premiers temps agricoles et l’anthropologie culturelle. A la même époque, l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales qui, sous la présidence de Jacques Le Goff développait une politique de décentralisation, proposa de s’associer à l’expérience, certains membres de la RCP animant déjà des séminaires de l’EHESS à Toulouse. Ainsi vit le jour en 1978 le « Centre d’Anthropologie des Sociétés Rurales », laboratoire CNRS/EHESS et qui eut tout au long de son existence des sigles différents (GR 44, ER 289, UMR 8555). Il comportait à l’origine deux équipes, l’une d’archéologie pré- et protohistorique, l’autre d’anthropologie culturelle.
 
Il constituait le volet « recherche » d’une antenne de l’EHESS ouverte à Toulouse pour animer des séminaires donnés dans l’esprit de l’école autour d’une direction d’études de pré et protohistoire créée pour la circonstance en 1978 et de charges de conférences progressivement transformées en directions d’études d’anthropologie. La possibilité de délivrer des diplômes spécifiques, des DEA et des thèses conféra rapidement à cette antenne un succès certain. Parmi les thèses délivrées on citera notamment celles de J. Vaquer, M. Barbaza, J. Gascó, P. Marinval, F. Briois, J.-L. Voruz, J. Zammit, L. Carozza, P. Boissinot, C. Manen, L. Bouby.

Le Centre regroupait des archéologues, des ethnologues, des historiens, des démographes. Implanté 56 rue du Taur, il eut successivement comme directeur J. Guilaine (1978-1990), J. Guilaine et D. Fabre (1990-1994), D. Fabre (1994-1998). Les thématiques archéologiques portaient essentiellement sur les origines du monde rural (Néolithique, Protohistoire) et les chantiers se déployaient dans le grand arc méditerranée occidental (Italie, Sud de la France, Andorre, Espagne). Une inflexion se dessina dans les années 1990 avec l’élargissement des chantiers à la Méditerranée de l’Est (Chypre, Egypte, Balkans) en liaison avec les recrutements internes.

Dans le même temps, l’éviction des locaux de la rue du Taur (appartenant au Rectorat mais gérés par l’Université de Toulouse II qui souhaitait y implanter un Institut du cinéma) contraignit le laboratoire à déménager dans un immeuble de l’Université Paul Sabatier (39 allée Jules-Guesde), ce dernier établissement ayant accepté de l’accueillir de même que l’antenne de l’EHESS à laquelle le lia une convention. Une troisième équipe d’anthropobiologie (direction : G. Larrouy puis E. Crubézy) vint se juxtaposer aux deux équipes existantes. Sous la direction générale de J.-P. Albert (qui succéda à D. Fabre en 1998), le laboratoire abandonna alors une partie de son intitulé (Sociétés Rurales) pour le simplifier en « Centre d’Anthropologie », les anthropologues culturels travaillant de plus en plus sur des thématiques urbaines.

Avec des recherches couvrant les champs de la Pré et Protohistoire, de l’Ethnologie et de l’Anthropologie physique, le Centre était le reflet de la pluridisciplinarité prônée par le CNRS depuis les années soixante-dix et à l’image des commissions correspondantes du Comité National et du CNU. La remise en cause de cette interdisciplinarité par le CNRS même dans les premières années du XXIe siècle se solda par une scission générale du laboratoire, un temps transformé en FRE 2960 (direction : E. Crubézy). L’équipe de Préhistoire, constituée en un Centre de l’EHESS (le Centre de Recherche sur la Préhistoire et la Protohistoire de la Méditerranée, CRPPM), se joignit à l’UMR UTAH (Université de Toulouse II) pour former l’UMR TRACES. Le Centre d’Anthropologie Sociale, autre centre de l’EHESS autour de l’équipe d’ethnologie, rejoignit le LISST (Université de Toulouse II). L’équipe d’anthropobiologie, devenue le laboratoire « AMIS », demeura basée à l’Université Paul Sabatier.

Le CRPPM, aujourd’hui composante de TRACES, n’est pas qu’une simple formation de recherche. C’est aussi un lieu d’enseignement EHESS (dispensé dans le cadre d’un Master le liant à Toulouse II) mais aussi un centre d’édition et de publications (à travers les Archives d’Écologie Préhistorique publiées avec le label de l’Ecole) et un centre de documentation disposant d’une bibliothèque constituée pour une large part sur la base d’échanges réalisés avec les publications des « Archives ».
Jean Guilaine