Histoire de la Gaule du Sud de l'Antiquité tardive et du Haut Moyen Âge

Il s'agit de replacer l'ensemble des études dans le contexte historiographique actuel. En effet, essayer de comprendre ce que furent les buts à court, moyen et long terme des élites gothiques, puis franques et des Romains collaborant avec elles, c'est s'inscrire dans un courant historiographique, fort déjà d'une longue tradition, celle de "l'École germanique", allemande et autrichienne (École de Vienne, H. Wolfram, W. Pohl), relayée dans ses perspectives de recherche par une École anglo-américaine que les concepts d'ethnicité, d'acculturation, de fusion des peuples n'effrayent pas. En France, les royaumes romano-barbares, hormis le royaume franc, intéressent moins les historiens.

C'est pour promouvoir ces recherches nouvelles dans le sud de la France sur le royaume wisigothique de Toulouse et la Gaule du Sud franque que cette équipe se constitue, en synergie avec l'équipe du Programme 2 Hispaniae pour tout ce qui touche à la frontière des Pyrénées, enjeu stratégique et historique de première importance sur la longue durée. De ce fait, les travaux en cours sur la frontière pyrénéenne semblent épouser également cette logique comparative (thèse et chantiers archéologiques d'A. Constant et travail ponctuel de Ch. Delaplace sur «l'affaire Gondovald»). D'autres recherches comparatives sont menées sur l'évolution des sociétés de Gaule méridionale (IVe- VIIe siècle) et de l'Espagne wisigothique, mais aussi sur les échanges artistiques de part et d'autre des Pyrénées (E. Boube, M.-G. Colin). Le projet d'un PCR mis en chantier par A. Constant «Espaces et systèmes castraux dans les Pyrénées méditerranéennes» a pour objet l'étude du castrum sur la longue durée (IVe-XIIe siècle) dans la partie méditerranéenne des Pyrénées, contrée entrecoupée de petites unités géographiques (vallée du Tech (Albères, Vallespir), Cerdagne, Conflent, Corbières et Fenouillèdes) correspondant pour certaines à d'anciens petits pagi. C'est dans l'objectif d'une étude systémique du castrum que sera orienté ce projet de PCR : il s'agira d'étudier non seulement la chronologie du réseau castral pyrénéen, depuis ses origines jusqu'à l'avènement de la féodalité, mais aussi les espaces les mieux documentés environnant certains de ces pôles. La mise en réseau des données entre les membres de l'équipe devrait permettre de mieux saisir les contrastes locaux ou, à l'inverse, l'évolution générale de cette structure fondamentale d'encadrement de l'espace. Une de ces zones est d'ores et déjà proposée dans le projet : elle englobe les communes de Sorède, d'Argelès-sur-Mer et de Collioure avec fouille programmée en cours (Ultréra, 2000-2006). On peut souhaiter une ouverture de ce projet sur les programmes suivants :

• « Établissements perchés et fortifiés de la fin de l'Antiquité et du Haut Moyen Âge en France méditerranéenne (IVe-IXe siècles) : destins singuliers ou évolution générale ? », dir. L. Schneider (CNRS, LAMM UMR 6572, Aix-en-Provence).
• « Al-Andalus-Hispaniae. Histoire, archéologie et littératures des sociétés ibériques au Moyen Âge (IIe-XVe siècles)", axe 3, Histoire et archéologie d'al-Andalus et de l'Espagne chrétienne (VIe-XIIe siècles), dir. P. Sénac (Professeur, FRAMESPA UMR 5136, U. de Toulouse 2 Le Mirail).
• programme RESOPYR.

Les groupes aristocratiques ont fait l'objet d'études approfondies pour cette période dans les régions germaniques, mais ils sont comparativement bien moins connus dans le Midi. Il s'agit de cerner les contours de ce groupe social, à la fois ses héritages culturels, ses contacts avec le royaume franc, ses éventuelles spécificités par rapport aux aristocraties septentrionales, et ses points de rupture. Cette enquête induit la collaboration étroite entre historiens des textes et archéologues dans le cadre d'un programme de recherche qui comprend :
1°, un inventaire du corpus des sources disponibles, à la fois textuelles (I. Réal) et archéologiques (E. Boube, F. Stutz, J.-P. Cazes, J-L. Boudartchouk) ;
2°, une base bibliographique et des enquêtes historiographiques, alimentées par l'ensemble des chercheurs intéressés ;
3°, des études de cas sur certains groupes de parenté pour lesquels se concentrent les informations (I. Réal) ;
4°, des études plus spécifiques sur le milieu épiscopal méridional bien éclairé par les sources.

Depuis la thèse de Régine Le Jan le fonctionnement du système de parenté dans la Gaule franque a acquis une valeur de paradigme. Or cette question n'a jamais fait l'objet d'une étude d'ensemble pour la Gaule du Sud qui ferait le lien entre ce que nous savons de ces phénomènes, en amont, pour le haut Empire, et en aval, pour la période post-carolingienne et féodale. Dans la continuité de sa thèse de doctorat, Isabelle Réal compte travailler sur les structures de parenté et la question de l'alliance matrimoniale dans la société méridionale (France du Midi et Espagne) entre le Ve et le Xe siècle, en appliquant à l'analyse des sources les outils et le questionnement anthropologique. Le choix de cette longue période de cinq siècles permettra de poser les questions de continuité et de fusion dans cet espace géographique tout à fait spécifique de confluence politique et culturelle, aux héritages à la fois romano-chrétien, franc et wisigoth.
 

Ch. Delaplace prépare pour ce quadriennal un projet de colloque international Sidoine Apollinaire, acteur et témoin des évolutions politiques de l'Occident romain au Ve siècle et un projet d'édition de texte en collaboration avec O. Devillers (Université de Bordeaux) et J. Meyer (Université de Montpellier) du Panégyrique de Théodoric d'Ennode de Pavie. C. Delaplace assure par ailleurs la co-tutelle de la thèse de B. Grouillet sur L'affaire Boèce. Recherches sur les luttes de pouvoir au sein des élites romaines et gothiques durant le règne de Théodoric (493-526) et étude historiographique du mythe.