Exploitation minière et production des métaux dans l'arrière-pays narbonnais durant le second âge du Fer et la période romaine

  • Responsable
Julien MANTENANT, doctorant à TRACES, CNRS-UMR 5608

  • Institutions partenaires
TRACES UMR 5608 UTM-CNRS
LMTG UMR 5563 UPS-CNRS
Service Régional de l'Archéologie (Languedoc-Roussillon)

  • Collaborateurs
Jean-Marc FABRE, UMR 5608
Marguerite MUNOZ, UMR 5563
Christian RICO, UMR 5608


Présentation générale 

Séparées par la plaine de l'Aude, la Montagne Noire et les Corbières constituent l'arrière-pays narbonnais, inclus dans le département de l'Aude (fig. 1). Au sein de ces deux massifs affleurent des terrains paléozoïques dans lesquels sont encaissées des minéralisations nombreuses, conférant à cette région un potentiel minier de premier ordre, au caractère polymétallique marqué. Si les gisements ferrifères dominent (chapeaux de fer, dépôts karstiques), les gîtes de cuivre et de plomb sont en effet bien représentés et comprennent généralement des minerais argentifères (cuivres gris et galène).

La richesse en métaux de ce territoire situé au cours de l'Antiquité à la croisée d'axes économiques majeurs reliant les domaines méditerranéen, atlantique, gaulois et ibérique, n'a pas échappé aux Anciens. Les études archéologiques engagées depuis les années 1970 ont révélé d'une part la présence dans la Montagne Noire de l'un des plus importants districts sidérurgiques du Monde Romain, et, d'autre part, l'existence dans les Corbières d'une phase d'exploitation antique des gisements de fer, cuivre, plomb et argent, dont la chronologie et l'impact économique  restaient toutefois à clarifier.
Le programme de prospection thématique mis en place en 2009 dans le cadre d'une thèse en archéologie vise à poursuivre l'inventaire des sites d'exploitation des gisements de fer, cuivre et plomb de l'arrière-pays narbonnais, spécifier la chronologie de l'activité et les techniques mises en oeuvre et enfin évaluer la nature et l'ampleur de la production. Le but final est de cerner précisément l'impact de la domination romaine sur l'exploitation minière et la production des métaux de cette région, plus particulièrement dans les domaines technique, économique et socio-culturel.


Descriptif des résultats



L'objectif de la première année d'étude était de reconnaître les principales zones d'activités  anciennes (extension des secteurs d'exploitations, chronologie de l'activité, nature des minéralisations) par le biais d'une recherche documentaire approfondie et d'un premier travail de prospection.
Elle a permis de distinguer, outre le district sidérurgique de la Montagne Noire, quatre pôles miniers anciens.








Dans les secteurs de Maisons et Padern-Montgaillard (Corbières centrales), minéralisés essentiellement en cuivre, plomb et argent, l'activité minière paraît s'être développée assez fortement dès la fin du IIème siècle avant notre ère et jusqu'au tournant de l'ère, mettant à profit les nombreux gisements de minerais non ferreux présents dans ces zones via des travaux à ciel ouvert et souterrains parfois de grande ampleur (fig. 2, 3 et 4). Les ouvrages connus actuellement n'atteignent cependant pas les dimensions exceptionnelles de la mine des Barrencs, située au coeur du pôle de Lastours (Montagne Noire).








Active aux IIème et Ier siècles av. n. è. et peut-être dès le début du second âge du Fer, cette mine en roche ouverte sur des minéralisations filoniennes à cuivres gris, galène et oxydes de fer est à ce jour la principale de l'arrière-pays narbonnais, et l'une des plus importantes du sud de la Gaule (fig. 5).











Enfin, autour du plateau de Lacamp (Corbières centrales), où affleurent de nombreux dépôts d'oxydes et hydroxydes de fer, les sept ateliers sidérurgiques antiques reconnus à ce jour fonctionnent aux Ier  siècle av. n. è. et Ier siècle de n. è. Dans les Corbières, d'autres zones de production antique ont été reconnues dans les hautes vallées du Torgan et de l'Orbieu (Massac, Montjoi, Auriac : fig 6) et sur les flancs du Pech Cardou (Rennes-les-Bains, Serres). Cependant, les sites d'exploitation anciens identifiés actuellement y sont peu nombreux et/ou pas précisément datés.












Cette première année d'étude correspond à une phase d'enquête préparatoire. Plusieurs questions restent en suspens. Ainsi, aucun site antique de traitement des minerais non ferreux n'a été clairement distingué à ce jour, malgré la présence de zones d'extraction parfois très importantes. Par ailleurs, les indice d'une mise en valeur des ressources minières régionales au second âge du Fer font totalement défaut, malgré un contexte économique très favorable, marqué par un essor important des échanges entre les sociétés indigènes et le monde méditerranéen. Ce sont là deux des points que nous souhaitons traiter en priorité en 2010, dans le cadre de prospections plus systématiques destinées à poursuivre l'inventaire des sites miniers et métallurgiques présents dans chacun des pôles cités plus haut et préciser la chronologie de l'activité. Ces investigations seront prolongées par l'étude approfondie de certains sites, en particulier la mine de l'Abeilla à Palairac, celles du Tistoulet et de la Caunetta, à Padern et enfin l'important site d'habitat du plateau du Juncas, à Lastours, contemporain de la mine des Barrencs située à moins d'un kilomètre plus au nord. Cette enquête est complétée par l'opération engagée depuis 2009 au sein du complexe minier des Barrencs par une équipe du laboratoire TRACES.