Programme structurant INNOV - Des sociétés en marche. Leviers et verrous de l’INNOVation au début de l’Holocène


L’innovation peut naître d’initiatives individuelles (l’invention). Pour exister, elle exige une mobilisation forte dans la durée pour aboutir à des produits, des techniques, des modes de pensées qui seront largement partagés ; dans ce cas, le groupe apporte une impulsion et une coordination à de grands projets qui répondent bien souvent à des besoins sociétaux. Mais, fréquemment, l’innovation surgit aussi de manière imprévisible du bouillonnement d’idées dans des anthroposystèmes dynamiques. Utile, vitale et/ou née de nouvelles valeurs, l’innovation présente dans tous les cas un impact potentiellement considérable dans les structures des sociétés qui l’ont engendrée de même que dans celles qui la recevront.

Les sociétés holocènes du bassin méditerranéen fondent leur évolution entre des processus de mutations internes et de vastes phénomènes de transgressions culturelles qui participent aux recompositions des systèmes de valeurs. Dans ce cadre théorique, le projet structurant INNOV de l’équipe PRBM vise à analyser sur le temps long, depuis la fin de l’Épipaléolithique jusqu’aux débuts de la Protohistoire, la dynamique de ces innovations, leur diffusion et leur assimilation en ciblant plusieurs actions déterminées par les programmes en cours ou à venir à partir de terrains d’étude diversifiés (voir figure). Trois axes complémentaires sont plus particulièrement explorés.
 
 
Schéma synthétique des 3 axes de réflexion du projet INNOV et des actions supports

Premièrement, l’interrogation porte sur les dynamiques d’amorçage de l’innovation, avec trois leviers qui se profilent. Tout d’abord, l’émergence d’une innovation peut être corrélée à des environnements socio-écologiques propices d’accessibilité et de contrôle des ressources. Une innovation peut aussi constituer une réponse à des demandes sociétales spécifiques (innover pour valoriser, pour répondre à une pression démographique ou à des changements dans les modes de production..). Enfin, via le partage d’idées entre groupes sociaux distincts, la mixité culturelle peut être un formidable tremplin à l’innovation.

Deuxièmement, quels sont les verrous à l’innovation, pourquoi la réprimer et comment se fait-il qu’elle puisse échouer ? Nos angles de lecture sont triples : il peut ne pas y avoir innovation car les potentialités offertes par le milieu sont incompatibles ou qu’un certain déterminisme géographique contraint les sociétés, dans des zones refuges, à demeurer conservatrices. Toute société définit également les termes de ce qui est acceptable. Une population donnée peut négliger une innovation car cette dernière n’est pas conforme à la norme et aux usages. Ce sont donc les conditions d’acceptabilité, d’emprunt ou de non emprunt d’une nouveauté qui doivent être explorées. Enfin, la mise en concurrence entre de grands centres producteurs peut maintenir des frontières sociales, économiques, culturelles. Il suffit que des monopoles priment en un lieu donné pour qu’une innovation ne soit pas admise, voire au contraire mise en rivalité.

Troisièmement, nous cherchons à caractériser les vecteurs, les rythmes de diffusion de l’innovation, ainsi que ses incidences. Tout l’intérêt est ici de détailler par l’identification de la naissance d’une nouveauté, de son transfert (imitation/importation) ou de son refus, quels sont la nature, l’intensité, le rythme et la distribution des flux, en d’autre termes comment se structurent les réseaux, quels sont les groupes émetteurs, ceux récepteurs.

Les différents axes thématiques de l’équipe permettent une approche diachronique et multiscalaire de ces différents processus et des mécanismes sous-jacents à l’évolution culturelle arythmique des sociétés holocènes.