Le dépôt métallique du VIe s. av. J.-C. de Tavers (Loiret) et son contexte archéologique


Responsables 
Pierre-Yves Milcent (TRACES, UT2J),
Christian Cribellier (Sous-direction de l'archéologie)
Arthur Tramon (TRACES)

Membres de l’équipe scientifique   
Véronique BARDEL (dessin des objets du dépôt métallique), Laurence BENQUET (TRACES, Inrap, étude des amphores républicaines), Pierre CARGOUËT (étude de la faune), Marie-Pierre CHAMBON (étude de la céramique antique et médiévale), Gauthier CRESPIN (militaria XIXème s.), Sarah DE GRANDIS (photographie du mobilier métallique du dépôt), Sam JOHN (dessin mobilier métallique), Lucille KARCHER (dessin mobilier métallique), Sylvain MADER (contexte géomorphologique), John NICHOLLS (prospection géophysique), Sandrine RIQUIER (étude de la céramique de la fin de l’âge du Fer), Guillaume SAINT-SEVER (TRACES, étude de la céramique : dessins, technologie céramique), Muriel TROUBADY (numismatique).

Campagnes 
Prospection géophysique suivie d’une opération de sondages  programmés en septembre 2014

Financement / Support logistique   
TRACES ; Ministère de la Culture
Portage financier : association ARCHEA (Association en Région Centre pour l’Histoire et l’Archéologie)

Présentation
Suite à la découverte délictueuse en 2012 par des détectoristes d'un dépôt d'objets en fer et en alliage cuivreux remarquable du premier âge du Fer sur la commune de Tavers, une opération programmée a été montée avec le concours du SRA Centre-Val de Loire et réalisée en 2014. En août, une prospection géophysique a été conduite à notre demande par la société Target Archaeological Geophysics, en la personne de J. Nicholls, à l’endroit de la découverte et dans son environnement immédiat. Les résultats obtenus sont excellents puisqu’ils révèlent, en plan, un réseau lâche de fossés et d’enclos d’époque antique ou postérieure, ainsi que la périphérie d’un site à fossé curviligne, probablement médiéval, une villa romaine et ses annexes, et enfin deux enclos fossoyés laténiens. L’étude du magnétogramme a guidé en septembre 2014 la réalisation de sondages archéologiques sous la forme de tranchées, prolongées parfois par quelques fenêtres. Au total, ce sont 1 459 m² qui ont été ouverts, soit 2 % de la surface d’étude. L’objectif premier du diagnostic était de retrouver la fosse du dépôt métallique et de caractériser les fossés proches afin de vérifier si certains n’étaient pas éventuellement attribuables au premier âge du Fer et donc contemporains des objets métalliques. On sait en effet que dans le nord-ouest de la France, des établissements ruraux de statut élevé peuvent être dotés, dès la seconde moitié du VIe s. av. J.-C., d’un grand fossé d’enclos quadrilatéral dont le tracé préfigure celui de certaines fermes encloses laténiennes.
 

Cliché : Michel Brin (2006)
 
Les sondages réalisés ont permis de dater les comblements des enclos fossoyés les plus proches du dépôt de La Tène D. Les monnaies et les céramiques découvertes relèvent de la mouvance économique des Carnutes de la région d’Orléans/Cenabum. Il est assuré désormais que l’enclos principal du site des Pièces de la Cave, de forme trapézoïdal (90 m [fossés N et S] × 80 m x 72 m avec le fossé le plus profond et le plus large face au nord-est), appartient à un important établissement gaulois, peut-être à vocation agro-pastorale. Au sud-est, un probable enclos secondaire, aux fossés moins larges, lui est parallèle et présente des indices d’activités de forge. Cet établissement gaulois présente en plusieurs points les traces d’un incendie daté du courant du Ier s. av. J.-C. Il précède une villa romaine qui perdure jusqu’au IVe s. apr. J.-C. Les vestiges d’une occupation médiévale témoignent que le site fut occupé ultérieurement, peut-être suite à un hiatus. La ferme actuelle des Caves peut être la lointaine héritière de cette occupation, qui aurait connu un déplacement de quelques centaines de mètres. Quoique modestes, des vestiges récents éclairent par ailleurs un des épisodes de la bataille de la Loire au cours duquel les Français tentèrent de stopper l'avancée prussienne en décembre 1870. Tout ceci témoigne d’une longue durée d’occupations, même si toutes les périodes ne sont pas représentées, du VIe s. av. J.-C. jusqu’à aujourd’hui.
 

Cliché : Arthur Tramon (2014)
 
Les différentes tranchées et fenêtres de sondage n’ont pas livré d’aménagements attribuables au premier âge du Fer, ni même de traces d’une fréquentation de cette époque. Seuls un ou deux tessons pourraient, sans certitude aucune, dater du premier âge du Fer, ce qui est bien peu. Quant à l’emplacement précis du dépôt métallique, celui-ci n’a pas été retrouvé non plus, malgré un décapage soigneux, et alors même qu’un fragment de bracelet, comparable à des éléments issus du dépôt, a été mis au jour par nos soins dans la zone désignée par les inventeurs comme étant celle de la découverte des objets. Il semblerait donc que la fosse du dépôt, apparemment peu profonde, était déjà détruite au moment de notre décapage, ou bien que son comblement n’était plus lisible dans un encaissant de même nature (argile sombre). Ces recherches montrent que le dépôt d’objets métalliques n’était pas enfoui au cœur, ni même en périphérie immédiate, d’un site du premier âge du Fer, qu’il s’agisse d’un habitat ou d’une nécropole. Il était donc relativement isolé. En l’absence de décapage systématique ou de tranchées ouvertes sur une surface plus étendue, notamment en direction du sud, il n’est toutefois pas question d’exclure l’hypothèse de la présence d’une occupation contemporaine éloignée de quelques dizaines ou centaines de mètres.
 
L'étude des 65 éléments collectés du dépôt, représentant 2 kg 678 de métal, montre que l'association du fer et du bronze dans un dépôt non funéraire est exceptionnelle. L'association des objets permet de l'attribuer à la seconde moitié du VIe s. av. J.-C. Les objets de parure, essentiellement féminins, dominent, mais quelques armes sont également représentées, ainsi qu'une série de haches à douille miniatures d'affinités armoricaines et un fragment de bassin étrusque. A bien des égards, ce dépôt est très original par sa composition et se trouve à la croisée de différentes traditions culturelles. Il fait connaître un large éventail de productions métalliques dans une région plutôt mal documentée de ce point de vue. Les analyses de composition révèlent l'importance du plomb dans les alliages cuivreux.

 

Cliché : Sarah De Grandis (2015)
 
Les recherches en cours, notamment archéométriques, vont s'attacher à préciser désormais l'origine des objets de ce dépôt. L'objectif est de contribuer notamment à une meilleure caractérisation des réseaux d'échanges à moyenne et logue distance au VIe s. av. J.-C. dans un contexte de hiérarchisation sociale croissante.

Publications       

Milcent P.-Y., Cribellier Ch., Tramon A. 2015a : Le dépôt bimétallique du VIe s. av. J.-C. de Tavers (Loiret) : présentation liminaire. Gallia, 72, 2, 2015, p.1-10.
Milcent P.-Y., Cribellier Ch., Tramon A. 2015b : Le dépôt métallique du VIe s. av. J.-C. des Pièces de la Cave et son contexte archéologique. Rapport d'opération, UT2J, TRACES, SRA Centre-Val de Loire.